Le soleil s’est couché, fini le crépuscule,
La voûte étoilée lentement se dessine
La vie s’est endormie comme l’on assassine,
Et l’on entend déjà la chouette qui hulule.

 

Voici que viens trouble ce naturel repos
Une lune bien pleine et toute lumineuse ;
Au milieu de la nuit elle nous éclairera,
Mais déjà elle réveille tous ces dormeurs là.

 

On voit le chat traquer une future proie,
Le papillon de nuit, cet ange de l’oubli,
Aller a tire d’aile vers cette lune là
Et moi, assis, le poète qui croit

 

Que le serpent partage le repas du mulot
Que l’ours aime l’abeille qui fait le fruit vermeil,
Et qui voit l’hirondelle avec l’aigle pareille ;
Posé sur une pierre, près de moi coule l’eau

 

Et je me fait bercer des ondes de la nuit.

 

Je sais qu’est près de moi le sombre ombre secrète,
Elle est dans toute chose, tout en étant néant,
C’est elle qui décide quand le gouffre béant
Cloue les planches du cercueil de ses sinistres dents ;
Quand l’enfant viens au monde, c’est elle qui le décrète

 

C’est une ombre bien triste, elle me ressemble,
Qui près de moi ce soir viens poser sa stature ;
Je cesse alors d’entendre (devant l’ombre l’on tremble)
Et mes yeux sont rivés sur cet obscur azur.

 

Celui qui dans les choses meurt et vis à la fois.
Elle n’etait pas venue pour moi, il n’était pas l’heure,
Car elle était très triste, cette fille du malheur,
Elle voulait converser, son ami ce fut moi.

 

La pauvre ombre comme moi vis dans la solitude,
Elle qui prends une vie pour en donner une autre ;
Et pour ce beau cadeau elle n’a de gratitude
Ni du linceul ardent, ni du mort qui se vautre,

 

Comme moi cette ombre regarde ce qui vis,
Et n’as pour seul bonheur que les hivers voir
Des jolis chrysanthèmes fleurir ceux qu’elle a pris
Par la lune éclairés quand est partit le soir.

 

Nous avons conversé ainsi toute une nuit
Et quand l’aurore vint, l’ombre est repartie
Me laissant un message en guise de merci,
« Il faut que les vivants un jour sachent ceci :

 

Quand une vie s’en va elle ne disparaît pas
Ne dédaignez dont point la seconde du trépas
Car sur ceux que l’on aime on peux toujours veiller
Puisqu’au fond du tombeau c’est la nuit étoilée.

 

S’il est quelqu’un un jour que vous avez aimé
D’un amour sincère, uniquement du cœur,
Dites lui quelque chose au milieu de vos pleurs
Ce quelqu’un l’entendra et je vous répondrai »

 

Hervé Boniface
26/01/2001

 

 

 

 

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